La création d'un ordre des audioprothésistes fait l'unanimité aux EPU
Les fraudes dans le secteur de l’audioprothèse et la création d’un ordre des audioprothésistes étaient sur toutes les langues de ces derniers EPU. A quoi ressemblerait cette institution, qui fait désormais presque l’unanimité dans la profession, en tant que réponse aux pratiques frauduleuses ?
Si par le passé, les avis étaient partagés, la création d’un ordre des audioprothésistes semble désormais faire la quasi-unanimité de la profession, selon les débats qui ont eu lieu lors des derniers EPU (Enseignements Post Universitaire en audioprothèse) qui se sont déroulés les 24 et 25 novembre 2023 à Lyon. Vu les dernières actualités en matière de fraudes, à la fin des interventions, aucun participant dans la salle ne s’est prononcé contre la création d’un tel ordre.
Les fraudes en audioprothèse se multiplient
Il faut dire que le ton était donné. Lors de la conférence sur l’actualité du SDA (Syndicat des Audioprothésistes) et du CNA (Collège Nationale des Audioprothésistes), Brice Jantzem, président du SDA, a d’abord posé le décor : « Nous avons vu les exercices illégaux se développer, alors nous avons décidé de médiatiser les fraudes ». Le syndicat a ainsi suivi deux procès, notamment celui des ‘faux audioprothésistes’ de Châlons-en-Champagne.
À la suite de plusieurs articles parus dans la presse, la Caisse Nationale d’Assurance Maladie a réagi en annonçant dans son rapport de juillet 2023 pour maîtriser les dépenses avec sa Proposition 27 : « Mettre en œuvre des actions de contrôle des prescriptions et des délivrances d’audioprothèses ». La CNAM a en effet justifié cette proposition par un grand nombre de nouveaux arrivants : « au regard de la très forte augmentation des sociétés d’audioprothèses (près de 30% de nouvelles sociétés en 3 ans), pour lutter contre les pratiques frauduleuses (exercice illégal de la profession, facturation de matériel différent de celui délivré, fausses ordonnances, etc.), et surveiller la délivrance d’audioprothèses aux populations jeunes ou fragiles (personnes en EPHAD) ».
La CNAM a d’ailleurs rapporté, lors d’une conférence de presse le 5 octobre, avoir déposé deux plaintes en cours d’instruction au pénal pour un préjudice d’environ 2,3 millions d’euros. Les deux sociétés ont arrêté leurs activités, et l’organisme a réussi a stopper un transfert de fonds vers l’étranger que l’une des deux sociétés avaient tenté de réaliser.
Puis le SDA a participé à l’émission Envoyé Spécial sur les fraudes en audioprothèse, qui a été diffusée le 7 septembre. « Nous avions malgré tout un peu peur de la façon dont l’émission allait faire réagir » a malgré tout avoué Brice Jantzem qui est content du résultat, puisque l’accent a été mis sur la prestation et montré que ce sont bien les nouveaux arrivants qui posent problèmes et pas les anciens.
La création d’un ordre des audioprothésistes pour lutter contre les fraudes
Et de conclure que le conseil d’administration du SDA avait voté le 11 septembre 2023 la volonté de création d’un ordre des audioprothésistes.
David Gélinas, le président de l’ordre des audioprothésistes du Québec est venu expliquer son fonctionnement à cette occasion « pour vous en inspirer », a-t-il expliqué. Au Québec, cette institution contrôle les compétences de ses membres, surveille et gère l’exercice, puis en cas de besoin gère le processus disciplinaire et lutte contre les fraudes. A ceux qui sont inquiets, David Gélinas répond que « L’ordre est là pour intervenir seulement quand ça ne va pas. Un ordre pourrait rétablir en France la confiance du public ».
Matthieu Del Rio, organisateur de ces EPU et président du CNA a expliqué que certains craignaient qu’un ordre limite le développement économique. « Si les règles sont les mêmes pour tout le monde, il est possible de tirer son épingle du jeu » a répondu David Gélinas.
Le prix de la cotisation en suspens
Pour finir, la seule question non tranchée reste le prix de la cotisation à cet ordre des audioprothésistes français, sujet pourtant important. Brice Jantzem l’évalue entre 500 et 1000 euros, alors que Matthieu Del Rio l’envisage plus autour des 1000 à 1500 euros.
« Avant de réfléchir à la cotisation, il faut déjà une volonté politique de le créer » a conclu Brice Jantzem, une précédente expérience avec l’ordre des infirmiers qui a été épinglé par un rapport de la cour des comptes en mars 2021, notamment sur ses frais de fonctionnement, ayant peut-être refroidi les velléités politiques.