Délai de remboursement des aides auditives : le SDA monte au créneau
Alors qu’Éric Chenut, président de la Mutualité française, propose d’espacer les remboursements du 100 % Santé pour réduire les coûts, le Syndicat des audioprothésistes (SDA) s’alarme. Il déplore des déclarations qui remettraient en cause l’accès à des soins auditifs jugés essentiels et appelle plutôt à recentrer le débat sur les dépenses des mutuelles et leurs frais de gestion pour actionner des leviers d’économie.

Tout d’abord, un petit rappel des faits s’impose. Dans une interview donnée aux Echos et publiée vendredi 11 avril, Éric Chenut, président de la Mutualité française, a dit souhaiter recentrer les garanties sur les soins essentiels, et a proposé d’espacer les remboursements du 100 % Santé : lunettes tous les trois ans et prothèses auditives tous les cinq ans. Des ajustements qui, selon lui, permettront de réduire les dépenses pour la sécurité sociale et d’alléger les charges des complémentaires santé. À la clé : une baisse des cotisations estimée entre 20 et 25 %. France Assureurs et la Mutualité française ont prévu de faire des propositions au gouvernement en ce sens.
Les aides auditives, des « soins essentiels » pour le SDA
Face à ces déclarations, les réactions ne se sont pas fait attendre du côté du Syndicat des audioprothésistes (SDA). L’organisation professionnelle a dénoncé l’absence de concertation préalable et une orientation qu’il juge « erronée ».
Le SDA a rappelé, support scientifique à l’appui, que l’appareillage auditif réduit le déclin cognitif chez les personnes âgées à risque. Aidant à rester en bonne santé plus longtemps, elles limitent les dépenses de santé, dans un contexte de vieillissement de la population. De ce fait, « l’équipement en aides auditives fait assurément partie du socle des soins essentiels », écrit le SDA.
Aux mutuelles de faire des économies ?
« Plutôt que de remettre en cause l’accès à des soins essentiels et scientifiquement validés comme les soins auditifs, il serait urgent de s’attaquer à des sources d’économies bien identifiées : les frais de gestion des complémentaires santé , l’inutilité de leurs plateformes de réseaux de soins,» a taclé le SDA dans son communiqué. Il cite notamment une mission du Sénat mettant en exergue une hausse de 33 % du montant nominal des frais de gestion de 2011 à 2022. Une progression deux fois plus rapide que l’inflation, qui était de 16 % sur cette même période.
Le syndicat pointe donc également les plateformes de réseaux de soins, créées par les complémentaires pour réduire les restes à charge, qui, selon lui, ont échoué à réduire le reste à charge et à contrer la fraude en audioprothèse. « Leur échec a conduit le gouvernement à mettre en place le 100 % Santé ». Aujourd’hui, toujours selon le SDA, leur maintien doit être remis en question, car elles n’ont pas su gérer le risque et pèsent sur les frais de gestion.
Repenser le tiers-payant
Le syndicat désigne également la complexité du tiers-payant géré par les complémentaires santé, qui est aujourd’hui fragmenté entre plusieurs systèmes, ce qui le rend complexe et difficile à gérer, car décentralisé. Cette situation a conduit à la professionnalisation du service, confié à des sociétés spécialisées (Tiers Payant Assistance, MR Gestion Tiers Payant, France Tiers Payant, etc.). Une complexité qui génère des surcoûts, du temps perdu pour les professionnels de santé, et expose à des risques de cybersécurité, énumère le SDA. En effet, début 2024, deux opérateurs de gestion du tiers-payant, Almerys et Viamedis, ont été la cible d’une cyberattaque ayant compromis les données de 33 millions d’assurés. Instaurer un système unique de tiers-payant permettrait non seulement de simplifier la gestion, mais aussi d’étendre le tiers-payant, de renforcer la sécurité des données, et de libérer du temps de soins pour les patients.
Autre source potentielle d’économie selon le SDA : la prise en charge par les complémentaires santé des médecines « douces » ou « alternatives », comme la naturopathie, sophrologie, réflexologie. Une orientation stratégique « qui offense les professionnels de santé », écrit le SDA, et que les sénateurs ont jugée « contestable et inflationniste », incitant à la surconsommation et dont les prestations par les Ocam avoisinent le milliard d’euros.