Que sait-on aujourd'hui de la maladie de Ménière ?

Ménière est une maladie chronique due à une augmentation de la pression des liquides dans l'oreille interne, dont l'origine et le remède sont encore inconnus. La médecine n'est malgré tout pas démunie face à ces symptômes.

Par Sylvain labaune, publié le 12 juillet 2024

Que sait-on aujourd’hui de la maladie de Ménière ?

Où en est aujourd’hui la médecine avec la maladie de Ménière, aussi appelée syndrome de Ménière ? Cette affection provoque des crises de vertiges aigües très pénibles, pouvant survenir à tout moment, dont le malade ressort complètement épuisé, physiquement et psychologiquement.

Le patient vit souvent dans la crainte que ces crises se reproduisent, tout en faisant parfois face à l’incompréhension de son entourage familial et professionnel ; en effet, les manifestations de la maladie ne sont pas visibles par les autres, en particulier en dehors des crises.

Ces crises, justement, peuvent durer de quelques minutes à plusieurs heures, voire plusieurs jours dans certains cas. La personne a l’impression que tout tourne autour d’elle, ce qui provoque des nausées pouvant aller jusqu’à des vomissements. Les crises provoquent une perte de l’audition, des acouphènes très forts et des migraines, en plus des troubles de l’équilibre.

Les vertiges s’accompagnent parfois de diarrhée, pâleur et suées. Dans certains cas, les yeux du malade font des mouvements involontaires, d’un côté à l’autre, de manière horizontale ou verticale, ce qu’on appelle un nystagmus. En cas de forte crise, le malade peut rester totalement prostré et profondément abattu, ne réagissant plus aux sollicitations extérieures.

« Lors des crises, tout tourne autour de moi. Je suis obligé de mettre ma tête dans un seau, car je n’arrête pas de vomir, avec un mal de mer qui m’oblige à marcher à quatre pattes », témoigne Daniel Petit, 68 ans, diagnostiqué en 2023.

Les acouphènes persistent généralement en dehors des crises, mais avec une intensité moindre. Les malades doivent souvent vivre en permanence avec des bourdonnements.

L’audition revient en partie après les crises ; cependant, plus celles-ci se répètent, plus la perte d’audition s’aggrave au cours du temps, sans retour en arrière possible. Les malades sont ainsi souvent obligés d’être appareillés.

Dans la grande majorité des cas, la maladie de Ménière ne touche qu’une seule oreille, mais elle peut parfois affecter les deux, dans 20 % des cas selon certaines estimations.

Plusieurs signes peuvent être annonciateurs d’une crise : les acouphènes montent en intensité, l’audition baisse avec la sensation d’avoir les oreilles bouchées, le malade ressent une sorte de pression au niveau du crâne et il l’a l’impression de tanguer comme s’il était ivre.

Une prévalence de 7,5 sur 100 000

D’après les études, la maladie de Ménière touche 7,5 personnes sur 100 000 en France. Elle serait légèrement plus fréquente chez les femmes (60 à 65 % des malades). L’âge moyen de survenue se situe entre 40 et 60 ans, mais elle peut apparaitre à tous les âges de la vie. Elle est cependant plus rare chez les enfants et les adolescents.

La maladie Ménière représente moins de 10 % des vertiges, ce qui la place loin derrière les vertiges positionnels paroxystiques (50 % des vertiges) ou les névrites vestibulaires.

La sévérité de Ménière varie d’une personne à l’autre, ce qui fait dire au Pr Vincent Darrouzet, président de la Société Française d’ORL (SFORL), qu’il s’agit d’une « maladie aux multiples facettes ».

Selon le professeur – aujourd’hui à la retraite, bien qu’il exerce encore à temps partiel au CHU de Bordeaux – « il y a des gens qui sont soignés et vivent à peu près correctement. Pour d’autres, c’est catastrophique, car la maladie signifie une perte de la vie professionnelle et familiale, rester chez soi, ne plus voyager, ne plus sortir au restaurant… bref une désocialisation totale. »

Dans certains cas, les crises sont très espacées dans le temps et peu intenses, n’occasionnant qu’une gêne passagère, tandis que d’autres personnes sont victimes de crises fréquentes et sévères, avec des acouphènes et une perte auditive importants.

Dans les situations les plus graves, les crises peuvent devenir presque permanentes, avec une sensation d’instabilité continue. Dans quelques cas, les crises vertigineuses peuvent même s’accompagner d’une impression d’être violemment poussé, ce qui entraine une chute. Ce sont les crises otolitiques de Tumarkin.

Prosper Menière a décrit la maladie qui porte aujourd’hui son nom en 1861, dans un mémoire sur « les lésions de l’oreille interne donnant lieu à des symptômes de congestion cérébrale apoplectiforme ».

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Prosper Ménière, le médecin français qui a découvert la maladie

La maladie a été décrite pour la première fois à la fin du XIXe siècle par le médecin français Prosper Ménière (1799-1862), qui lui a donné son nom.

Pendant sa carrière, Prosper Ménière prenait en charge des patients qui souffraient de crises de vertiges récurrentes.

À l’époque, les vertiges étaient considérés comme un problème d’ordre cérébral, mais le docteur Ménière a montré qu’ils résultent d’un dysfonctionnement de l’oreille interne.

Il a décrit la maladie comme correspondant à une « triade » de symptômes : vertiges (avec nausées et/ou vomissements), surdité et acouphènes.

À 62 ans, soit une année avant sa mort, il présenta ses résultats à l’Académie impériale de médecine, le 8 janvier 1861, dans un mémoire sur « les lésions de l’oreille interne donnant lieu à des symptômes de congestion cérébrale apoplectiforme ». Prosper Ménière était alors médecin-chef de l’Institution des sourds-muets de Paris.

Les connaissances de l’époque sur l’équilibre et les vertiges étaient peu documentées et les suppositions quant à leur origine, qui privilégiaient donc le système nerveux central, intégraient des causes vasculaires, comitiales ou syncopales. Cela explique le titre de son mémoire.