Mickaël Le Gascoin : « Certains centres auditifs ne sont pas assez à l'écoute des personnes handicapées »

À 34 ans, Mickaël Le Gascoin souffre d'un syndrome rare qui réduit progressivement son audition et sa vue. Plutôt que de se laisser abattre, il met à profit son expérience pour aider les personnes en situation de handicap, notamment pour obtenir des aides au financement de leurs appareils auditifs.

Par Sylvain labaune, publié le 22 mai 2025

Mickaël Le Gascoin : « Certains centres auditifs ne sont pas assez à l’écoute des personnes handicapées »

Mickaël est atteint du syndrome d’Usher. Cette maladie rare, qui toucherait environ 4 000 personnes en France, lui fait perdre progressivement l’audition et la vue. Le jeune homme, originaire de Bretagne, a été diagnostiqué en 2019, après l’apparition de problèmes de vision deux ans plus tôt. Sourd depuis la naissance, il en ignorait jusqu’ici la cause. Son degré de surdité a toujours été assez profond. Depuis son plus jeune âge, il ne peut pas entendre sans ses appareils. « Ma surdité a été détectée à l’âge d’un an, explique-t-il. J’ai été appareillé à deux ans, puis j’ai suivi une scolarité dans des établissements classiques. À l’époque, personne ne soupçonnait l’existence du syndrome d’Usher. » Après plusieurs années dans le commerce à Paris, Mickaël vit aujourd’hui à Pornic, en Loire- Atlantique. Il partage son temps entre des études en première année à la faculté de médecine de Nantes pour devenir pair- aidant, c’est-à-dire aidant des personnes porteuses du même handicap que lui, ainsi que plusieurs activités associatives et une passion pour la photographie.

Un double handicap

C’est en 2017, à l’âge de 26 ans, que les premiers signes visuels du syndrome d’Usher sont apparus. « Je manquais de vision dans la pénombre et mon champ visuel commençait à se rétrécir. Je ne comprenais pas ce qui m’arrivait. » Pris de panique, il n’a pas consulté de médecins et a cherché seul des réponses sur Internet. « Je pense que c’est la plus grosse erreur de ma vie », confie-t-il. Le diagnostic tombe deux ans plus tard, lors d’un séjour prolongé au Québec. « Quand on apprend que l’on va devenir sourd et aveugle, c’est toute une vie qui s’écroule. » Depuis, sa vision sur les côtés s’est considérablement réduite. « C’est comme si je voyais à travers le trou d’un rouleau de Sopalin. Je dois désormais utiliser une canne pour me déplacer dans la rue. » Au niveau de l’audition, le syndrome aggrave progressivement la surdité bilatérale déjà présente depuis la naissance. Chez Mickaël, la dégradation est très progressive. « L’évolution est douce, cela se fait un petit peu tous les jours, aussi bien pour la vue que pour l’audition. »

Un besoin vital d’appareils de haut niveau

Aujourd’hui, grâce à des appareils auditifs de haute performance, Mickaël entend plutôt correctement. Cependant, cet équipement haut de gamme a un cout assez important : « C’est 4 000 euros qu’il faut débourser tous les quatre ans. »

Il est équipé depuis toujours d’appareils Phonak, sa marque de prédilection avec laquelle il a ses habitudes depuis qu’il est petit. Son audioprothésiste actuel est basé à Paris et Mickaël est obligé de faire le trajet depuis Pornic pour le consulter. « J’ai confiance en lui, il travaille avec Phonak et connait bien ma maladie, donc je suis prêt à faire le trajet. » Or, il est difficile aujourd’hui, pour une personne en situation de handicap, de bénéficier d’une aide financière pour acheter ses précieuses prothèses. Le principal frein, selon Mickaël, est la difficulté à remplir les dossiers de demande de financement. « Aujourd’hui, les trois quarts des personnes en situation de handicap n’arrivent pas à envoyer leurs demandes auprès des MDPH, de l’Agefiph ou d’autres organismes. »

Mickaël suggère de mettre en place des référents spécialisés dans les centres auditifs pour accompagner les personnes en situation de handicap dans leur demande de subvention. « Monter un dossier demande beaucoup de temps et de paperasse. Or certaines personnes sourdes ou polyhandicapées ont du mal à communiquer. On aurait parfois besoin d’un peu plus d’écoute et de compréhension de la part de certains centres, estime-t-il. Personnellement, je connais plusieurs personnes qui ont renoncé à s’équiper à cause de difficultés à monter un dossier de subvention. Résultat, elles ne peuvent pas acheter d’appareils d’un niveau de performance suffisant, ce qui aggrave leur handicap. » Outre les difficultés administratives, Mickaël pointe aussi un manque d’accessibilité numérique dans le secteur de l’audition. Selon lui, les sites Internet des audioprothésistes sont inadaptés aux personnes malvoyantes.

« Il n’y a pas d’option dans ce sens sur les pages Internet, comme l’augmentation du contraste ou la lecture vocale. De manière générale, le secteur de l’audition ne prend pas suffisamment en compte les personnes atteintes d’un autre handicap », estime-t-il.

 

À 34 ans, Mickaël Le Gascoin multiplie les activités, au premier rang desquels la photographie, malgré son handicap. Il s’est donné pour mission d’aider d’autres personnes atteintes du syndrome d’Usher.

MLG

Création d’une association et d’un média

C’est justement pour aider les personnes en situation de handicap que Mickaël a tout récemment (en avril 2025) fondé l’association Les Copains de Micka, qui tiendra bientôt des permanences dans la région de Pornic. Ces permanences, qui auront lieu une à deux fois par mois, permettront, entre autres, d’aider les personnes à monter des dossiers de financement pour s’équiper.

En parallèle, Mickaël a lancé Voix inclusives, un média en ligne, dont l’idée est née en 2020, pendant le premier confinement, à un moment où il s’est retrouvé isolé et en quête d’informations sur sa maladie. « C’est une plateforme qui permet de sensibiliser et de donner des informations à titre gratuit sur tout ce qui est en lien avec la maladie et le handicap, à travers des interviews et des portraits en vidéo », explique-t-il.

Malgré un double handicap, Mickaël redouble d’énergie et multiplie les activités. Il met aujourd’hui son expérience au service des autres, notamment pour rendre le parcours vers l’appareillage un peu moins difficile.

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