Elon Musk prévoit de " guérir les acouphènes d'ici à cinq ans "

Dans un tweet, le célèbre milliardaire Elon Musk a affirmé que la puce cérébrale produite par son entreprise Neuralink pourrait « guérir » les acouphènes d'ici à 2027. Des scientifiques se demandent si ce délai de cinq ans est réellement tenable, tandis que les défenseurs des animaux critiquent la méthode des tests.

Lucile Perreau et Corinne Couté, publié le 17 mai 2023

Elon Musk prévoit de ” guérir les acouphènes d’ici à cinq ans “

Neuralink, une start-up créée par Elon Musk en 2016, développe actuellement un implant cérébral dont l’une des applications pourrait concerner le traitement des acouphènes.

Elon Musk est un habitué des avancées technologiques. Il a d’abord fait fortune avec Paypal, puis a créé Space X, Tesla et Neuralink, dont il est le patron. Son tweet du 24 avril 2022, dans lequel il annonce que son dispositif de stimulation cérébral pourrait être au point d’ici à cinq ans, a donc été pris très au sérieux.

Le dispositif, appelé « interface cerveau-ordinateur », consiste en une puce de la taille d’une pièce de monnaie, appelée Link, qui est implantée sous l’os du crâne et connectée à des zones cérébrales par un robot chirurgical de précision. Ce dernier « branche » un millier de fils miniatures à certains neurones. La puce se connecte ensuite à un ordinateur externe par Bluetooth, avec une communication dans les deux sens destinée à envoyer et récupérer les informations de l’implant.

L’implant cérébral de Neuralink est composé d’une puce grosse comme une pièce de monnaie, reliée à un millier de fils miniatures, sortes d’électrodes pour neurones.

Activité cérébrale stimulée

D’une part, le dispositif permet de lire l’activité cérébrale ; il pourrait donc donner la possibilité à des personnes paralysées de communiquer sur un ordinateur par leur seule pensée. D’autre part, il permet de stimuler des zones cérébrales, ce qui, selon Elon Musk, pourrait aider les personnes souffrant de divers types de troubles neurologiques, dans lesquels une déconnexion ou un dysfonctionnement entre le cerveau et les nerfs est responsable de la pathologie. Cela concerne les personnes atteintes de paraplégie, quadriplégie, maladie de Parkinson, épilepsie… L’implant pourrait également soigner la dépression, les pertes de mémoires, les douleurs extrêmes ou les acouphènes. Elon Musk affirme en particulier que cette puce pourrait guérir les acouphènes d’ici à 2027.

Ce système de stimulation directe des neurones existe déjà avec des dispositifs comportant une centaine d’électrodes, contre plus de mille pour l’implant de Neuralink, ce qui permettrait d’ouvrir le champ des applications.

Dans son tweet du 24 avril 2022, Elon Musk confirme que son implant cérébral pourrait être au point dans moins de cinq ans et que le nombre d’électrodes, environ 1 000, serait suffisant pour prendre en charge les acouphènes.

Essais sur l’homme dès la fin de l’année

D’abord testé sur les porcs, l’implant est désormais en cours d’essais sur les singes, avant de pouvoir passer à la phase d’expérimentation humaine. Les essais du prototype Neuralink sur l’homme devraient commencer vers la fin 2022, sous réserve de l’approbation de la Food and Drug Administration (FDA) aux États-Unis.

Cependant, le projet Neuralink fait face à de nombreuses critiques. Certains scientifiques estiment que le délai de cinq ans n’est pas raisonnable. Et les défenseurs du bien-être animal relatent le décès de singes dans des conditions suspectes lors de ces essais (lire l’encadré).

Dans un article de The Conversation (theconversation.com), David Tuffley, maître de conférences en éthique appliquée et cybersécurité à l’école des technologies de l’information et de la communication de l’université Griffith à Brisbane / Gold Coast en Australie, s’interroge sur la véracité de cette affirmation fracassante. Selon lui, le dispositif neuroprothétique de Neuralink pourrait effectivement être utile à l’avenir pour les personnes atteintes de troubles neurologiques tels que la maladie de Parkinson ou l’épilepsie. En revanche, le délai lui paraît trop court, car on ne sait pas combien de temps il faudra pour que les données cliniques confirmant que le dispositif est sûr pour un usage humain obtiennent l’approbation de la FDA.

Neuralink, Elon Musk

« Ne pas se faire de faux espoirs »

En effet, l’administration classe Neuralink dans la catégorie des dispositifs médicaux de classe III, soit la plus risquée. Avant de commencer les essais sur l’homme, le dispositif doit passer avec succès des contrôles réglementaires rigoureux. La société doit fournir des données exhaustives sur les essais cliniques réalisés sur des sujets non humains (notamment sur des singes) afin de justifier le passage à la phase suivante. La FDA s’intéressera aussi à l’aspect pratique du retrait ou de la réparation du dispositif en cas de dysfonctionnement, ainsi qu’à la manière de gérer le risque de lésion ou d’infection cérébrale. Or, au cours des récents tests, huit singes sont morts à la suite de l’implantation.

Une fois que la FDA aura approuvé le dispositif (si elle le fait), Neuralink devrait recruter des volontaires humains pour la prochaine série d’essais. Personne ne sait combien de temps il faudra avant que le dispositif ne soit commercialisé ni combien il coûtera. Cela pourrait prendre des années, avec un prix qui le mettrait hors de portée de tous, sauf des plus riches. Pour David Tuffley, il est donc « sage de ne pas se faire de faux espoirs quant à un implant abordable à court terme ».

 

 

Huit singes morts pendant les essais

Lors des tests de l’implant cérébral Neuralink, effectués dans les laboratoires de l’université de Californie, à Davis, un signalement a été fait par le Physicians Committee for Responsible Medicine, une association nationale américaine à but non lucratif regroupant 17 000 médecins, indiquant une « violation flagrante de la loi sur le bien-être animal ».

Le courrier indiquait que « beaucoup de singes, si ce n’est tous, font l’expérience de souffrances extrêmes résultant de soin animal inapproprié et d’une expérimentation hautement invasive avec des implants cérébraux ».

La start-up a confirmé que sur les 23 singes intégrés aux essais, huit avaient dû être euthanasiés à la suite de leur implantation, deux d’entre eux à une date prévue pour collecter des données, mais six autres sur les conseils du vétérinaire pour des complications chirurgicales (un animal), la défaillance d’un appareil (un animal) ou pour des infections suspects en lien avec l’appareil (quatre animaux).

Neuralink s’est défendu de ces accusations dans une vidéo postée en mai 2022, arguant qu’il n’existait pas de solution outre que de tester sur les animaux. La start-up a également affirmé mettre en place de nouveaux protocoles chirurgicaux en réponse à cette hécatombe.

 

Le premier prototype de Neuralink se portait derrière l’oreille, comme une aide auditive, mais la dernière version, grande comme une pièce de monnaie, est greffée sur le crâne et dissimulée dans les cheveux.

De microfils, sorte de micro-électrodes, sont insérés jusqu’à des zones spécifiques du cerveau, qui peuvent ainsi être stimulées par impulsion électrique. Il possède 1 024 électrodes, ce qui en fait sa particularité, selon Neuralink, car les dispositifs de ce type ne dépasseraient actuellement pas la centaine d’électrodes, un nombre insuffisant selon la start-up.

Le Link de Neuralink se recharge par magnétisme, comme un téléphone mobile.

Selon le fabricant, une heure d’opération est nécessaire à son implantation, avec seulement un jour d’hospitalisation.

Ce fonctionnement et son installation ne sont pas sans rappeler celui des implants cochléaires, insérés dans la cochlée pour stimuler le nerf auditif.

L’implant cérébral de Neuralink est constitué d’une puce reliée à 1 024 électrodes « branchées » dans le cerveau.

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